Fluor Architecture - Guillaume Avenard et Hervé Schneider
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Théâtre du Maillon

STRASBOURG / Face à la volonté de la ville de doter le théâtre du Maillon d’un bâtiment digne de ses acteurs, de ses artistes et de leur public, le projet déploie une architecture unique au service de son environnement.

En adéquation avec le foisonnement de création engagé depuis toujours par les équipes du Maillon et en réponse à la relative gravité du schéma directeur du futur quartier d’affaires international Wacken Europe, le futur équipement a été pensé afin d’affirmer son identité sensible loin des architectures domestiques des bâtiments voisins (logements, bureaux, équipements hôteliers), au profit d’une narration juste et élégante. Une sorte de Maillon fort de la Communauté Urbaine de Strasbourg, en somme…

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Face à la place Adrien Zeller, le théâtre du Maillon se doit d’instaurer un dialogue avec cette esplanade pensée comme le futur véritable centre du Wacken. Ce pôle multimodal desservant efficacement l’équipement jouera le rôle de parvis à l’édifice, de zone de rencontre magnifiée par un miroir d’eau et à l’abri d’arbres de haute tige en guise d’ombrières. La gestion des flux automobiles par une réduction des vitesses sur le pourtour de la place concourra à lier efficacement cet espace à l’entrée du futur équipement, qui s’installera à l’angle sud-est de la parcelle, sur le sillon botanique.

Devant l’afflux important de spectateurs, l’aménagement du sillon a été repris afin d’offrir au droit de l’entrée un second parvis d’accueil plus important. Ainsi, au sommet de l’escalier monumental issu de l’aménagement de l’agence Merat Workteam, se développe le niveau RDC du futur théâtre, au niveau +138,10. Cette altimétrie permet de respecter le Plan de Prévention des Risques d’Inondation et d’offrir un niveau de référence similaire à l’aménagement voisin, 1,30 m plus haut que le niveau moyen des voies adjacentes.
Cette entrée résolument tournée vers la ville et le futur quartier d’affaires Wacken Europe permet une localisation aisée du point d’accès des spectateurs, tout en bénéficiant des aménagements paysagers de qualité s’adossant au futur équipement.
Sur cette même façade (est) se développe l’une des dessertes latérales de la Grande salle, entièrement vitrée sur le sillon paysager, signifiant ainsi, en cas de représentation nocturne, l’activité du bâtiment du côté du futur quartier d’affaires.

Côté sud, face à la ville, la façade respecte le retrait maximal autorisé et est entièrement vitrée sur l’espace de convivialité du public, signalant ainsi à la ville l’effervescence au sein du bâtiment. Une lisibilité des entités « publiques » est ainsi assurée par un jeu de transparences en pied de façades.

L’organisation du bâtiment ne néglige pas non plus à l’ouest le chemin du Wacken. Par l’installation des entités réservées aux artistes et au personnel administratif, et leur entrée réservée sur cette façade, le bâtiment est largement ouvert sur les aménagements paysagers du parc MMA et qualifie favorablement la façade urbaine le long de cette voie.

Au nord, la parcelle est aménagée pour accueillir les livraisons par semi-remorques et camionnettes. Pour autant, le caractère technique de la zone est dissimulé par un traitement identique aux autres façades.

Afin d’offrir un théâtre proposant la majeure partie des locaux au même niveau que les deux salles de spectacle et des zones de livraison et de déchargement, synonymes de confort d’utilisation pour les techniciens du futur équipement, l’emprise construite du bâtiment occupe pleinement la surface disponible de la parcelle, se développant côtés ouest et est en limite de propriété, suivant ainsi la continuité urbaine sur ces deux faces. Côtés sud et nord, le bâtiment profite des reculs autorisés pour offrir des espaces végétalisés en pied de façade côté ville, ainsi que des espaces de manœuvre suffisants aux semi-remorques à l’arrière de l’édifice. Cette absence d’alignement strict côté ville permet d’affirmer le caractère particulier de cette pièce urbaine monolithique.

 

Construire un théâtre n’est pas un acte anodin. Pour cette raison, il convient d’user d’une écriture originale afin de marquer le caractère institutionnel de l’équipement public. Il convient également d’user d’une écriture contemporaine mais non sophistiquée à l’image de la philosophie du théâtre qu’elle accueille.
Le théâtre du Maillon ne mérite-t-il pas mieux qu’un bâtiment high-tech à la modernité attardée, comme le seront les programmes immobiliers construits dans l’emprise du quartier d’affaires voisin ?

Ainsi, l’architecte n’a pas trouvé opportun de disperser les principales entités du programme en volumétries singulièrement identifiables. Il en résulte un bâtiment d’expression unitaire, une sorte d’iceberg en zone inondable, une pièce de bois épannelée dans la masse abritant une fabrique à théâtre où chaque élément programmatique fonctionne avec son voisin pour former un tout performant. Il en résulte un bâtiment chapiteau, abri des spectacles circassiens que le théâtre accueillera, qui homogénéise une programmation entraînant des volumes aux surfaces et aux hauteurs disparates.

Ce choix architectural dégage une plasticité révélant une cinquième façade respectueuse des vues périphériques (certains bâtiments du quartier d’affaires voisin, plus hauts que le futur théâtre, auront une vue directe sur la couverture de l’équipement). Ce dispositif permet de camoufler les éléments disgracieux que l’architecture contemporaine omet parfois de traiter (équipements techniques et étanchéité).
Enfin, cette option permet d’animer les façades aveugles de l’équipement (nombreux espaces de stockages, salles de représentation « boîtes noires ») grâce à la multitude de lignes brisées en bas-relief qu’elle propose.

A l’image de Strasbourg, cité à la silhouette particulièrement plane ponctuée de multiples toits et flèches symboles, le futur théâtre se développe en proposant plusieurs typologies. Sur les voies périphériques, il se décompose en masses assez basses en adéquation avec le caractère domestique de ces promenades qui l’entourent. Sur sa face principale, celle qui fait face à la ville, une flèche marque la présence de l’équipement en bout de la perspective de la voie liant la place de Bordeaux à Schiltigheim. Elle permet aussi de signaler l’entrée de l’édifice au flux de spectateurs se rendant aux manifestations en transport en commun.

L’utilisation du bois permet une construction optimale du projet tout en assurant une qualité thermique et acoustique excellente. Sa matérialité confère au projet une puissance romantique, une chaleur bienveillante en harmonie avec les aménagements paysagers qui l’entourent, non sans rappeler les nombreuses maisons à colombages, notamment dans le quartier de la Petite France, aux abords de l’hôpital civil et de la Cathédrale qui ont fait la renommée de la ville.
Ce matériau largement disponible dans les forêts vosgiennes voisines permettra de bénéficier d’un circuit court de production et de s’affranchir de l’utilisation de matériaux extraits et manutentionnés à l’autre bout de la planète.
Le bardage bois de teinte naturelle évoluera au fil des saisons. L’équipement dévoilera ainsi un autre visage, renforcé par la géométrie aléatoire de ce dernier, qui révèlera ici et là des ombres portées concourant à cette animation.

Ce dispositif d’enveloppe permettra la mise en œuvre d’une logique constructive simple et évolutive. En effet, le bâti de l’équipement sera formé de « boîtes » en béton armé, isolées par l’extérieur, chapeautées par des toitures-terrasses étanchées recueillant les ruissellements d’eau de pluie que le bardage en lames de bois à claire-voie filtrera (évitant ainsi des ruissellement en cascade sur le bardage ou des rétentions d’eau en points bas). Enveloppant ce bâti, la nappe en bois épousera la forme du corps qu’il protège, s’étirant au gré des éventuelles évolutions programmatiques que tout projet subit en plan ou en coupe durant sa phase de conception. La structure de ce bardage sera constituée de légères ossatures métalliques prenant parfois naissance au sol, enjambant parfois depuis les acrotères, s’appuyant parfois sur les voiles tels des contreforts.
Seul le hall de convivialité bénéficiera de ce voile comme de sa propre couverture, afin d’offrir, côté intérieur, des perspectives vertigineuses sur la sous-face de cette enveloppe et de la flèche qu’elle dessine au niveau de l’entrée de l’édifice.
Enfin, la mise en œuvre en claire-voie des ouvrages en bois permettra la nuit d’animer la globalité de l’édifice par un jeu de lumière en sous face que l’espacement entre chaque lame filtrera. La couleur et l’intensité de cette scénographie pourront varier au gré des représentations.

Le traitement intérieur des espaces respectera la philosophie du lieu actuel chère aux usagers et proposera des ambiances vraies, modernes mais non sophistiquées où convivialité et échanges seront les maîtres-mots en phase conception. L’avis des futurs utilisateurs sera fortement sollicité afin d’affiner aux plus près des exigences du personnel du Maillon et de la Ville de Strasbourg, l’atmosphère des futurs lieux.

Texte réalisé d’après la notice produite par l’agence Rudy Ricciotti (novembre 2013).

Culture,Théâtre du Maillon
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